L’Administration Internationale et le Nouveau Droit de la Mer

L’Administration Internationale et le Nouveau Droit de la Mer
Préparé par: Dr Laurice Rizkallah

Le nouveau système d’institutions appelé à s’occuper de la mise en oeuvre du droit de la mer et de tout ce qui a trait aux océans est composé depuis l’entrée en vigueur de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer en 1995: de l’Autorité internationale des fonds marins avec ses différents organes l’Assemblée, le Conseil et le Secrétariat, du Tribunal international du droit de la mer et de la Commission des limites du plateau continental.
Investie de fonctions importantes le Secrétariat – organe administratif de l’Autorité internationale des fonds marins dénommé l’Autorité – fera l’objet de la présente étude. Il se distingue par sa structure bureaucratique (Section I) et sa coordination avec le Secrétariat de l’O.N.U. (Section II)

 

Section I - Structure bureautique
Nous analyserons successivement le statut du Secrétaire général (&1) et le recrutement du personnel administratif (&2).

 &1 - Statut du Secrétaire général.
A - Agent administratif ne se mêlant pas de politique.
A la différence de son statut à l'O.N.U. où il est nommé par l'Assemblée Générale sur recommandation du Conseil,(1) le Secrétaire Général de l'Autorité est élu par l'Assemblée parmi les candidats proposés  par  le  Conseil  pour  une  durée  de  quatre  ans  et  il  est rééligible(2). C'est un agent administratif ne se mêlant pas de politique. C'est ce qui le distingue du Secrétaire Général de l'O.N.U. qui est, à la fois, agent administratif et homme politique.

 

B - Le plus haut fonctionnaire de l'Autorité.
Placé à la tête de l'Administration il est en relation directe avec ses organes; ses fonctions administratives dérivent directement de sa qualité de «plus haut fonctionnaire» de l'Autorité: c'est lui qui nomme le personnel, il fixe également les conditions et modalités de sa rémunération et de son licenciement conformément aux règles, règlements et procédures de l'Autorité. Des fonctions variées lui sont attribuées en vertu des paragraphes 3 et 4 de l'article 166, puisqu'il a charge de présenter à l'Assemblée un rapport annuel sur l'activité de l'Autorité; il prépare, en outre, le projet du budget annuel de l'Autorité.
Conformément à la structure bureaucratique du Secrétariat, le Secrétaire Général est responsable du fonctionnement de l'ensemble des services face aux organes détenant la décision politique. Le lien unissant toutes les parties de l'édifice est, en effet, fondé sur le principe hiérarchique d'après lequel l'impulsion et l'orientation sont données d'en haut par voie d'autorité; chacun est responsable, à son niveau, devant son supérieur immédiat et ceux qui sont placés au-dessus de lui. Autrement dit, les membres du personnel sont répartis en un certain nombre d'unités de travail constituées d'après le principe de la spécialisation et placées sous l'Autorité d'un supérieur responsable du bon accomplissement de leur tâche; ces unités sont regroupées à l'intérieur de divisions plus larges, toujours suivant le même principe et sous l'autorité d'un supérieur plus élevé, elles-mêmes réunies dans une structure plus vaste suivant la construction pyramidale stratifiée et hiérarchique, jusqu'au «plus haut fonctionnaire de l'organisation», c'est-à-dire le Secrétaire Général.
Ce système ne peut évidemment fonctionner que dans la mesure où l'autorité du Secrétaire Général se fait effectivement sentir du haut en bas de l'appareil bureaucratique. Ceci suppose que d'une part l'information circule de façon parfaite en descendant et remontant la ligne hiérarchique, et que d'autre part les chefs de service, aux différents niveaux où ils sont placés, ne mènent pas leur politique personnelle et se soumettent sans résistance aux impulsions venues d'en haut; et que par conséquent le volume des activités, le nombre et la diversité des décisions à prendre au sommet, ne dépassent pas la capacité d'assimilation des dossiers et le pouvoir de volonté du titulaire de la charge.

 

C - Médiateur entre les principaux organes.
Les responsabilités administratives du Secrétaire Général sont, de ce fait, extrêremement lourdes et lui confèrent un rôle particulièrement important dans sa médiation entre les deux organes délibérants, cette qualité de médiateur lui donnant droit précisément, au sein de l'Autorité des fonds marins, de participer à toutes les réunions de l'Assemblée et du Conseil ainsi que de tout autre organe subsidiaire. Le Secrétaire Général et le reste du personnel administratif bénéficient, conformément à l'article 168 de la Convention, du statut de fonctionnaires internationaux: dans l'exercice de leurs fonctions, ils ne sollicitent et n'acceptent d'instructions d'aucun gouvernement, ni d'aucune source extérieure à l'Autorité.

 

 &2 -  Recrutement du personnel administratif.
A - Principe de recrutement.

Le personnel administratif de l'«Autorité» est nommé, tout comme à l'O.N.U., par le Secrétaire Général. Ce qui exclut, «a priori», toute ingérence des Etats dans le recrutement. Le personnel nécessaire à recruter dépend, toutefois, de la nature des fonctions de l'Autorité. En effet, dès les premières années des travaux de la 3ème Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer le Rapport préliminaire du Secrétaire Général, soulignant les besoins en personnel de l'Autorité et les besoins de formation qui s'y rattachent établit une “classification entre les diverses fonctions tels: le transfert des techniques, les besoins dans le domaine juridique, la protection de l'environnement, la recherche, l'information et enfin les fonctions générales de l'Autorité”(3) Les besoins de l'Entreprise étaient envisagés à part, vue l'importance opérationnelle dévolue à cet organe.
Le personnel de l'Autorité devait comprendre, selon les premières estimations effectuées(4), 142 administrateurs et fonctionnaires de rang élevé et 328 agents des services généraux. Dans chacun des domaines délimités, l'Autorité devrait avoir recours à un personnel nombreux et varié, Dans le domaine juridique par exemple, l'Autorité sera amenée à conclure de nombreux contrats et accords qui nécessiteront des spécialistes dans des branches diverses. Le rapport préconise l’ouverture d’un bureau spécial ayant à sa tête un directeur et un sous-directeur, avec trois subdivisions: la première division portera sur les références et l'analyse des rapports, la seconde sur les inspections et les contrôles et la troisième sur la recherche. Chacune d'elles doit être composée de trois membres. Il s'y ajoute un corps d'inspecteurs prévu par la Convention, chargé des fonctions de contrôle de l'Autorité.
Le personnel recruté pour les besoins de «l'Autorité internationale des fonds marins» doit plus que dans toute autre administration bénéficier d'un statut indépendant, étant donné que le domaine de l'Autorité n'est autre que le fond des mers: patrimoine commun de l'humanité. Par conséquent, leur indépendance doit être garantie pour répondre aux besoins de leur Institution. Cependant, depuis l’adoption de l’Accord de juillet 1994 et l’entrée en vigueur de la Convention le 16 novembre de la même année le Secrétaire de l’Autorité, conformément au paragraphe 1 de la section 2 de l’appendice de l’Accord, devrait s’aquitter des fonctions de l’Entreprise jusqu’au ce que celle- ci commence à fonctionner indépendamment. Donc, les travaux prévus pour le Secrétariat font ressortir de très importantes considérations touchant les travaux connexes au cours de la période de démarrage de l’Autorité qui, pour s’aquitter des fonctions qui lui ont été assignées, devrait mettre en place un système de budgétisation et de contrôle financier, un système d’administration financière y compris des services de trésorerie et de paye, un système de recrutement d’administration et de gestion du personnel et un système d’administration et de gestion générale, y compris la passation de marchés et les actes, les transports, l’impression, la reproduction ainsi que les questions de sécurité”
Dès lors les travaux du Secrétariat de l’Autorité - se fondant sur son expérience tirée de l’exécution de ses tâches organisationnelles initiales et de la détermination des activités à mener pendant la première année de sa phase fonctionnelle- devraient se partager entre les quatres divisions indiquées dans le programme de travail relatif aux services de conférences nécessaires à l’Autorité en 1996 et qui se trouvent réparties comme suit: division de la recherche et de la planification; division du suivi et de la vérification; division de l’élaboration des règles, règlements et procédures; division de l’administration.
Le Bureau du Secrétariat Général doit ainsi, conformément à ce programme, définir l’orientation générale des activités du Secrétariat et en assurer la gestion; prendre des dispositions en vue de fournir des services fonctionnels et des services de conférence à l’Assemblée, au Conseil, à la Commission juridique et technique et à la Commission des finances. Il doit, en outre, entretenir des relations avec l’extérieur, élaborer, si nécessaire, des accords appelés à régir les relations avec les organisations internationales; fournir des services d’information afin de faire connaître les activités de la nouvelle institution.
Par conséquent, le personnel du Secrétariat de l’Autorité devrait être hautement spécialisé, surtout dans les domaines de la géologie marine, informatique, planification des entreprises, génie maritime etc... On estime que pendant la première phase fonctionnelle le Secrétariat de l’Autorité aura, en tout, besoin de 20 postes d’administrateurs et de fonctionnaires de rang supérieur et 30 postes d’agents locaux.

 

B) - Critères de recrutement.
La Convention retient un double critère: celui, de la compétence technique et celui classique, de la répartition géographique équitable.

 

a) - Prédominance de la compétence technique.
L’Administration internationale destinée à gérer le “patrimoine commun de l’humanité”, - c’est à dire le fond des mers, ce domaine nouveau du droit international public nécessitant pour sa gestion une technologie très sophistiquée et jusqu’alors ignorée dans les administrations classiques - ne peut fonctionner qu’avec un personnel hautement qualifié pour répondre aux nouveaux besoins de l’Autorité internationale des fonds marins qui dépassent les besoins classiques de toute administration qu’elle soit nationale ou internationale.
Par conséquent, et le texte de la Convention est très clair sur ce point, la considération dominante dans le recrutement et la fixation des conditions d’emploi du personnel est d’assurer à l’Autorité les services de personnes possédant les plus hautes qualitiés de travail et de compétence dans les domaines scientifiques, techniques et autres leur permettant d’exercer leurs fonctions administratives(5). Ce qui entraîne de facto la primauté de la formation du personnel administratif aux nouvelles techniques nécessaires au bon fonctionnement de l’Administration(6). Ce sont les pays en voie de développement ne disposant pas de telles techniques et redoutant l'écueil de leur pénurie en cadres qualifiés qui ont soulevé ce problème. Ils réclament, la formation technique de leurs ressortissants afin de pouvoir participer aux différents organes de l'Autorité.
Il est nécessaire de rappeler, ici, que la formation du personnel originaire des pays en voie de développement n'est pas une conception nouvelle et, très tôt, le sujet a été mis relief à la table des négociations du Comité des fonds marins. L'étude du Secrétaire Général relative à la création d'un mécanisme international considérait, en effet, la formation des ressortissants des pays en voie de développement comme l'une des fonctions du futur mécanisme. Celui-ci aurait pour tâche «de mettre sur pied et d'exécuter des programmes de formation qui pourraient être organisés de façons diverses soit en coopération avec les gouvernements intéressés, soit avec des organisations ou groupes régionaux, soit avec des exploitants autorisés ainsi qu'avec les organes des Nations Unies qui mettent au point des projets dans ce domaine». Il doit également s'assurer que les exploitants autorisés en vertu du régime international «s'acquittent de leurs obligations relatives à la formation du personnel».
     D’autre part, les projets déposés par les Etats(7) au cours des premières sessions de la 3ème Conférence mentionnaient presque tous, la nécessité de la formation du personnel administratif. Cette idée fut reprise à la 3ème session par le président de la 1ère Commission qui donnait l’alerte en déclarant que «si l'on ne commence pas immédiatement à instruire et à former des ressortissants des pays en développement dans les domaines scientifiques et techniques pertinents, l'équilibre géographique de l'Autorité sera très long à réaliser»(8). Les pays développés proposèrent aussitôt une formule de formation par le canal bilatéral(9). La Grande-Bretagne, par exemple, suggéra la création d'un fonds pour le financement des opérations de formation, alimenté par des contributions volontaires et administrées sur une base multilatérale(10).
A l'issue de ce débat, il fut demandé au Secrétariat d'effectuer une étude sur les besoins de l'Autorité en personnel et les moyens de leur formation.Le Rapport présenté par le Secrétaire général(11) suggérait la création d'un institut de formation du personnel administratif de l'Autorité et l'utilisation des infrastructures déjà existantes. Ces modalités n'ont en fait rien de nouveau, puisqu’il existait déjà un institut de formation au sein de l'O.N.U. et de l'O.I.T. Il est prévu également dans le Rapport, d'associer les sociétés transnationales à la formation du personnel. Tout en admettant le bien-fondé de l'argument, certains ont pu critiquer cette suggestion. N’est–ce point, encore là, ouvrir une porte aux sociétés transnationales facilitant ainsi la pénétration des organisations internationales dans le domaine des fonds marins(12)?Cette orientation n'a pas été suivie à la 3ème Conférence; le T.N.C.O. fut modifié dans le sens d'un élargissement des pouvoirs de l'Autorité et par la mise à la charge du contractant l'obligation d'établir un programme de formation à l'intention du personnel de l'Autorité et des pays en développement(13). La Convention considérant la formation du personnel administratif de l'Autorité des fonds marins comme l'un de ses objectifs fondamentaux, imposait cette obligation aux Etats et contractants d'une part, et aux centres nationaux et régionaux d'autre part.
Le texte de Montego Bay prévoit «la nécessité pour les Etats de promouvoir la mise en valeur des ressources humaines par la formation et l'enseignement dispensés aux ressortissants des Etats et pays en voie de développement, des programmes de formation du personnel de l’Autorité permettant leur participation à toute les activités menées dans la Zone ainsi que des centres régionaux de recherche scientifique et technique(14). Or, la constitution de ces centres(15) ne pouvant relever que de la coopération internationale et non de la compétence exclusive de l'Autorité, vu les difficultés qu'éprouvera cette dernière tant en ce qui concerne le financement de ces centres que l'assistance technique préconisée, l'expérience de ces programmes s'est souvent soldée par un échec(16).
Si l'exigence des qualifications techniques se justifie par la nécessité de doter l'Autorité d'un personnel compétent eu égard à la mission qui lui est assignée elle constitue, toutefois, un obstacle au recrutement des ressortissants des pays en développement. Le critère classique de la répartition géographique équitable contribuera-t-il à faire éviter ce déséquilibre dans la composition du personnel administratif de l'Autorité?
 

b) - Principe de la répartition géographique.
 1- Souplesse et relativité du principe.
Sous la réserve de la «considération dominante des plus hautes qualités de travail, de compétence et d'intégrité», il est dûment tenu compte de l'importance d'un recrutement effectué sur une «base géographique aussi large que possible»(17). On ne saurait, certes, concevoir un Secrétariat composé de fonctionnaires qui auraient tous la même origine nationale. Aussi bien l'article 167, paragraphe 2 s'attache-t-il, autant que l'article 101, paragraphe 3 de la charte de l'O.N.U., plutôt à l'application de ce principe qu'à son affirmation, et à la définition de la méthode propre à la mettre en œuvre; le recrutement «sur une base géographique aussi large que possible» est un concept éminemment souple et relatif.
Cette relativité est sans doute inévitable si on se réfère aux “plus hautes qualités de travail et de compétence», comme critère du choix des personnes, car il peut résulter des difficultés pratiques dans l'élargissement de la base géographique. Les candidats présentant les qualifications voulues ne seront pas toujours et nécessairement disponibles dans les parties du monde où, du point de vue du principe géographique, il eût été souhaitable de les trouver. D'un point de vue théorique, les deux principes de «l'excellence personnelle» et de la «répartition géographique» se complètent parfaitement. En pratique, leur combinaison peut conduire à des situations inextricables, et c'est bien ce qui s'est passé dans la réalité non seulement au sein de l'Autorité mais dans toutes les institutions Onusiennes. Les difficultés inhérentes à ce problème sont aggravées par toute une série de facteurs historiques résultant de l'attitude des Etats membres qui rendent presqu’inefficace le principe géographique.

 

2 - Inefficacité réelle du principe.
Les Etats manifestent souvent un très grand intérêt à ce que leurs ressortissants soient nombreux aux postes administratifs notamment les plus élevés. Il y a là certainement un souci de prestige, mais aussi un problème de confiance: c'est pour eux une garantie morale que leurs positions et, éventuellement leurs problèmes, seront plus fidèlement présentés et compris au sein du Secrétariat et que les valeurs auxquelles ils sont attachés y trouveront des partisans avertis. Beaucoup espèrent aussi être mieux informés de ce qui se passe dans le Secrétariat et certains, sans aucun doute, y voient encore un moyen d'exercer une influence plus grande sur les travaux de l'Organisation. La valeur de ce dernier calcul est toutefois discutable: l'expérience a montré que les fonctionnaires internationaux suspectés d'entretenir des relations trop étroites avec leur gouvernement, en violation de leur statut, se trouvaient souvent mis à l'écart de nombreux circuits administratifs auxquels leur poste aurait dû les intégrer, ou perdaient une bonne part de leur crédibilité, dont la place est si considérable dans les relations de service.
Cette attitude des Etats a entraîné un durcissement du principe de la répartition géographique équitable. Celui-ci exclut une répartition basée sur des critères non géographiques (politiques ou idéologiques par exemple). Il n'implique pas la prise en considération du facteur national: celle des régions sous-régions eût pu suffire. Les difficultés d'application du critère géographique(18) ont conduit les membres de l'O.N.U. par exemple à réclamer, ce qui était encore moins évitable, une application «quantifiée» du principe. On fut donc conduit à l'adoption d'un système de “quota” national. La base essentielle de calcul de ce quota est la contribution budgétaire qui a finalement pris le dessus sur la répartition par Etat membre(19). Tel est l'état de la Jurisprudence internationale qui a précisé que le critère de compétence l'emporte sur celui de la répartition géographique sur la base de quota attribué à chaque Etat membre, selon des modes de calcul variables(20). Or, il résulte de cette procédure une inégalité flagrante dans la répartition du personnel au sein des ogranisations internationales(21) malgré les nombreuses résolutions de l'Assemblée Générale appelant à un meilleur équilibre afin de répondre aux aspirations des pays en développement et des ex-pays socialistes(22). Des pays occidentaux comme la R.F.A. et le Japon étaient également sous-représentés.
Si la perspective de l'autonomie financière de l'Autorité laisse envisager un moindre recours aux conditions budgétaires, la question qui demeure posée est celle de savoir s'il est toujours possible d'assurer, dans la pratique la «répartition géographique équitable»: D'autant plus que l'Autorité aura encore besoin et, pour de longues années, des contributions financières des Etats membres certes, mais aussi et surtout des Etats non-membres (comme les Etats-Unis par exemple). Néanmoins, si le personnel de l'Autorité est recruté dans sa grande majorité dans les pays développés la démocratie pourra être respectée si les dispositions relatives à l'indépendance dudit personnel sont effectives.

 

C ) - Garantie du personnel administratif.
Cela suppose l’exclusion de toute immixtion des Etats dans le fonctionnement de l’Administration internationale qui doit garantir la vie de son personnel contre toute atteinte à sa dignité et à sa liberté d’action dans l’exercice de sa carrière.

a) - Exclusion de toute ingérence des Etats.
Le Secrétariat de l'Autorité est un organe «intégré». La mission générale de son personnel consiste donc à participer à la préparation des décisions (fourniture de renseignements, rapports, préparation des délibérations) et à leur exécution. Ils agissent sous l'autorité des organes politiques délibérants et leur part d'initiative est en principe limitée. Ils bénéficient, comme dans toutes les organisations internationales d'un statut de fonctionnement international(23). Or, pour assurer le respect de se statut, il est prévu dans la Convention que le «Secrétaire général et le personnel ne sollicitent, ni acceptent d'instructions d'aucun gouvernement»(24). Ce qui exclut, a priori, toute ingérence des Etats dans leur recrutement et dans l'exercice de leur carrière(25). D'où la nécessité de clauses de protection et de garanties de ces agents internationaux: l'indépendance tant à l'égard de leur Etat d'origine que de l'Etat hôte et de tout autre Etat membre constitue l'objectif majeur du droit de la fonction publique internationale. Cette obligation est faite aux chefs des administrations internationales comme à leurs fonctionnaires dans à peu près toutes les chartes constitutives des organisations internationales et constitue, à n'en pas douter, un «principe général de droit»(26) en ce domaine.
De plus, le traitement des fonctionnaires est prélevé sur les ressources de l'Organisation(27), et l'évolution de leur carrière dépend de l'organisation dont ils relèvent. Par conséquent, le personnel qui ne s'acquitte pas de ses obligations en application des textes,celui qui manifeste une insuffisance professionnelle ou se rend coupable de faute disciplinaire, est passible de sanctions diverses, allant de l'avancement à la révocation de la part de l'Autorité investie du pouvoir de nomination. Toutefois, ils bénéficient de privilèges et immunités comme garantie juridique pour un exercice indépendant dans leurs fonctions internationales.

 

b) - Privilèges et immunités.
Ils concernent l'organisation, les représentants de ses membres, ses fonctionnaires.
1) - Quant à l'organisation, il s’agit surtout de l’inviolabilité des locaux, de l’immunité de juridiction ainsi que des privilèges financiers et fiscaux.
= Inviolabilité des locaux.

Il s'agit, en effet, d'assurer aux bénéficiaires des organisations internationales l'indépendance nécessaire à l'exercice de leurs fonctions. L'un des principaux privilèges est constitué par l'inviolabilité des locaux de l'organisation, généralement reconnue par les accords de sièges(28), aux termes desquels, les autorités de l'Etat du siège ne peuvent pénétrer sans autorisation du Directeur ou du Secrétaire général de l'organisation dans tous les locaux qu'elle occupe, qu'ils soient ou non sa propriété(29). En contrepartie, l'organisation s'engage généralement à veiller à la sécurité et au maintien de l'ordre au sein des locaux, qui ne pourront servir de refuge aux personnes tentant d'échapper à une arrestation.
= L'immunité de juridiction est également très importante, puisqu'elle permet aux organisations, sur le modèle du privilège reconnu aux Etats souverains, d'échapper aux poursuites judiciaires devant les tribunaux nationaux de l'Etat du siège(30). Valable à l'égard de toute juridiction, l'immunité l'est également, en principe, pour tous les actes de l'organisation. Contrairement à la tendance prévalant en matière d'immunité de juridiction des Etats, de plus en plus restreinte par les droits nationaux aux actes accomplis dans le seul exercice de la puissance publique (jure imperii), il apparaît raisonnable de «maintenir à l'immunité de juridiction des organisations internationales le champ d'application le plus large, eu égard à leur nécessaire implantation sur le territoire d'un Etat»(31).
= Privilèges financiers.
Les organisations internationales se voient reconnaître des privilèges financiers et fiscaux. Il leur est généralement accordé la liberté de détention de fonds et de transfert de toutes devises étrangères et les Etats hôtes renoncent à percevoir sur elles tous impôts directs voire indirects, losque cela est possible(32). Elles sont de même exonérées des droits de douane. Enfin, toutes facilités leurs sont accordées pour que puissent se réunir en leur siège les représentants de tous les Etats membres (octroi rapide de visa d'entrées, exemption du contrôle des conditions de séjour de ses représentants, etc...).

 

2) - Quant aux agents de l'organisation.
= Immunités judiciaires.

Inspirés tant par ceux qui sont reconnus aux personnels diplomatiques en poste à l'étranger que par ceux que possèdent leur propre organisation, ils sont surtout constitués par l'immunité judiciaire à l'égard des tribunaux locaux, du moins en raison des actes accomplis dans l'exercice de leur fonctions, immunité d'ailleurs susceptible d'être levée par l'organisation elle-même.
= Immunité fiscale.
Ils possèdent aussi l'immunité fiscale les dispensant de payer l'impôt sur leur salaire, dont ils n'ont pas à déclarer le montant à l'administration locale(33). Dans le cadre universel, la Cour Internationale de Justice a eu récemment l'occasion d'interpréter une disposition de la Convention sur les privilèges et immunités des Nations Unies (section 22 de l'article 6,) pour savoir si une personne n'étant pas fonctionnaire de l'organisation mais agissant en qualité d'expert désigné par l'un de ses organes subsidiaires (la sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et la protection des minorités) pouvait bien bénéficier du régime de protection qu'elle établit. Sa réponse fut positive(34).
Malgré cet arsenal de mesures adoptées afin d'assurer aux agents internationaux l'exercice effectif et indépendant de leurs fonctions on ne peut que constater dans la pratique les menaces sérieuses pesant sur cette indépendance du fait des ingérences gouvernementales sur le recrutement, la pression financière exercée sur certains d'entre eux, quand ce n'est pas (comme c'est le cas du directeur d'origine romaine de l'Institut des Nations Unies pour le désarmement), la contrainte physique et l'interdicton persistante de regagner son poste(35). Ces pressions ne peuvent que rendre plus vulnérable le Secrétaire Général et son personnel à l'égard des Etats principaux contributeurs car, il ne peut rien entreprendre (étude, recherche, rapports etc...) sans leur appui et même leur autorisation.
Que signifie donc l'indépendance des agents internationaux dans un domaine qui ne peut fonctionner qu'avec une technologie très avancée et un personnel très qualifié chose qui ne peut se faire qu'avec l'autorisation de ceux qui détiennent cette technologie.? D'autant plus que «les techniciens ne sont pas des robots»(36), et le fonctionnaire international est issu d'un milieu social donné, qu'il est imprégné d'une certaine idéologie et que l'on ne peut le contraindre à renoncer à ses convictions politiques. La thèse de l'homme «neutre» a, d'ailleurs été totalement rejetée.(37)
Toutefois, et malgré la fragilité de son impact, la théorie de l'indépendance des fonctionnaires ne saurait être abandonnée. Elle constitue un «garde-fou» contre les ingérences des Etats, surtout en ce qui concerne le personnel de l'Autorité.Il ne suffit pas, pour assurer l'équlibre dans le recrutement, d'augmenter le personnel administratif en provenance des pays en développement, l'important est que l'organisation elle-même (ici l'Autorité des fonds marins) puisse réellement constituer un instrument de lutte contre le sous-développement et que les Etats d'origine, qu'ils soient développés ou sous-développés, s'engagent dans une voie qui permette la réalisation concrète de cet objectif.
Par conséquent, c'est une prise de conscience sincère et réelle qu'il faut exiger, le «pouvoir du nombre» s'est révélé impuissant à régler des problèmes qui ne trouvent leur vraie solution que dans le développement technique et scientifique, non loin, toutefois, de la coordination politique. La société internationale d'aujourd'hui devrait se fonder sur les principes techniques et économiques doublés du critère fondamental de l'interdépendance entre les détenteurs de cette arme nouvelle: la technologie, et les «héritiers» du «patrimoine commun de l'humanité», afin de promouvoir la justice et le bien-être général de tous les hommes de la terre. La coordination avec le Secrétariat de l’O.N.U. rendrait plus efficace la mise en oeuvre de ces principes en aidant le Secrétariat de l’Autorité à fonctionner dans le réel et non seulement au niveau des textes.

 

Section II - Coordination avec le Secrétariat de l'O.N.U.
L'origine de la fonction confiée au Secrétaire Général des Nations Unies à l'égard du nouveau droit de la mer doit être recherchée dans une proposition faite par la délégation du Pérou qui prônait la création «d'une Commission internationale du droit de la mer en tant qu'organe intergouvernemental chargé d'étudier les problèmes qui pourraient découler tant de l'application de la Convention que des situations non prévues dans cet instrument»(38).
Vu l'importance conférée au rôle du Secrétariat de l'O.N.U. par l'Accord de juillet 1994 qui lui confie la tâche de remplacer le Secrétariat de l'Autorité dans ses fonctions en attendant que l'Autorité puisse démarrer, nous nous proposons d'analyser les fonctions dévolues au Secrétaire Général soit classiques (&1) soit nouvelles (&2).

 

&1 - Fonctions classiques de dépositaire.
En vertu de l'article 319 de la Convention, le Secrétaire Général de l'O.N.U. est chargé des fonctions de dépositaire au sens de l'article 77 de la Convention de Vienne sur le droit des traités(39) auxquelles s'ajoutent quelques fonctions administratives concernant les réunions des Etats parties à la Convention(40), ou relatives au mécanisme du règlement des différends mis sur pied par la Convention sur le droit de la mer(41). Celles-ci peuvent, néanmoins, être considérées comme des fonctions occassionnelles présentant un rapport étroit de connexité avec le rôle de dépositaire proprement dit. Il s'agit en somme de fonctions relatives à l'instrument conventionnel lui-même et qui sont plus ou moins intimement liées à la vie même de la Convention. En elles-mêmes, elles ne présentent aucune particularité et n'ont d'autre originalité que leur importante étendue, à raison du volume et de la fréquence des notifications et communications prévues par la Convention et ses Annexes.
Néanmoins, le caractère extrêmement vague de la formule «rapport sur les questions de caractère général à propos de la Convention» laisse évidemment indéterminés l'objet et la portée des rapports établis sur la base de l'article 319. Le Secrétaire général des Nations Unies a tenté, à cet effet, d'identifier les principales nécessités auxquelles ces rapports pourraient répondre; Ainsi la nécessité d'informer la communauté internationale des faits nouveaux propres à promouvoir les buts et les objectifs de la Convention; d'évaluer de façon suivie l'information, les Conseils et l'assistance dont les Etats ont besoin en application de la Convention; de poursuivre la coopération internationale sur les questions maritimes auxquelles s'applique la Convention et d'examiner les questions intéressant directement les organisations internationales compétentes de traiter des questions qui se posent selon une approche multidisciplinaire, afin de présenter l'arrière-plan de chaque question et de la situer dans son contexte(42).
Si l’on observe, d’ailleurs, la manière dont le Secrétariat de l'O.N.U. perçoit sa responsabilité en la matière, et plus particulièrement à partir des Rapports présentés à l'Assemblée Générale, où sont longuement recensés les faits nouveaux relatifs à la Convention on se rend bien compte qu'il y a là une esquisse des éléments d'une politique globale du Secrétariat visant à régir tous les aspects de ses activités relatives à la mise en œuvre du nouveau droit de la mer, notamment en ce qui concerne l'application uniforme et cohérente de la Convention, l'évolution du nouveau régime et la coopération au sein du système des Nations Unies.
A ces fonctions attribuées par la Convention et renforcées par l'optique globalisante du Secrétariat de l'O.N.U. quant à son appui à sa mise en œuvre, viennent s'ajouter quelques fonctions nouvelles ignorées jusque là des secrétariats classiques.

 

&2- Fonctions nouvelles.
Il s'agit d'abord, de certaines fonctions résultant de la nouvelle situation juridique engendrée par la 3ème Conférence(43) avant même l'adoption du texte de la Convention et qui sont relatives à l'établissement des limites de la juridiction des Etats côtiers ensuite, des fonctions qui ont été confiées au Secrétariat de l'O.N.U. par les Résolutions I et II de l'Acte final signé en 1982.

 

A) - Relatives à l'établissement des limites de la juridiction des Etats côtiers.
a) - Fixer le cadre spatial des droits économiques des Etats côtiers.
Ces fonctions sont en “relation directe avec le droit international économique dans la mesure où elles concernent principalement la fixation du cadre saptial des droits économiques des Etats côtiers sur les ressources marines»(44). L'Etat côtier, conformément aux articles 16,47,75 et 84 de la Convention, est tenu «de donner la publicité voulue aux cartes maritimes ou listes de coordonnées géographiques qui font ressortir les lignes de base de sa mer territoriale, les limites de sa zone économique exclusive et de son plateau continental ainsi que les lignes de délimitations correspondantes(45). Il doit, conformément às ces mêmes articles, déposer un exemplaire de ces cartes ou listes de coordonnées auprès du Secrétaire Général de l'O.N.U.(46) Ce dernier sert ainsi de dépositaire pour la réception, l'enregistrement et l'archivage de ces divers documents, mais il est également en mesure d'intervenir, dans leur diffusion.
Ainsi, de nombreux Etats côtiers qui n'ont pas les moyens d'assurer par eux-mêmes la publicité internationale requise pour les limites de leurs Zones maritimes, peuvent considérer l'O.N.U. comme un moyen approprié à cet effet. Il s'agit, en d'autres termes de l'interprétation que le Secrétaire général des Nations Unies donne à ces dispositions. Dès lors, et après avoir commencé à recevoir en dépôt des cartes marines et des listes de coordonnées fournies notamment par les gouvernements qui ont déjà ratifié la Convention, il envisage, à présent, les moyens de publier ces matériaux ou de les communiquer aux Etats sur leur demande(47). Il remet au Secrétaire Général de l'Organisation des Nations Unies les cartes et renseignements pertinents, y compris les données géographiques, qui indiquent de façon permanente la limite extérieure de son plateau continental. Le Secrétaire général donne à ces documents la publicité voulue. Sans doute, les cartes ou listes de coordonnées indiquant l'emplacement de la limite extérieure du plateau continental devront-elle être également déposées auprès du Secrétaire Général de l'Autorité internationale des fonds marins, mais c'est le Secrétariat de l'O.N.U. qui est chargé de leur publication, car l'article 134 de la Partie XI fait expressément renvoi à la Partie VI pour ce qui concerne la publicité à donner aux cartes ou listes de coordonnées indiquant l'emplacement des limites de la juridiction nationale.

 

b) - Assurer l'application uniforme et cohérente des règles de la Convention.
L'Assemblée générale l'a officiellement investi de cette mission en demandant au Secrétaire général le 13 décembre 1984 «de continuer à aider les Etats à appliquer la Convention et à adopter une conception cohérente et uniforme du nouveau régime juridique qu'elle a établi»(48). Le Secrétariat tend ainsi à renforcer le caractère coutumier qui s'attache à certaines règles énoncées dans la Convention, voire même à préciser le contenu et la portée de ces règles. Il a, en effet, entrepris, depuis 1983, d'étudier les aspects techniques de l'établissement des limites de la juridiction nationale des Etats côtiers, en consultation avec la Commission océanographique intergouvernementale et l'Organisation hydrographique internationale(49).
Il examine actuellement les techniques permettant de rationaliser non seulement le classement des diverses échelles de cartes marines, mais aussi les méthodes utilisées par les Etats pour tracer les lignes de base ou les lignes de délimitation et établir les listes de coordonnées(50). Il répond également à un besoin souligné par l'Assemblée Générale dans ses résolutions du 14 décembre 1983 et du 13 décembre 1984: «Dans leur processus de développement, les Etats, en particulier les pays en développement, ont besoin d'un volume croissant d'information de services consultatifs et d'assistance pour être à même de profiter pleinement des avantages du régime juridique complet établi par la Convention”(51).
C'est dans la même perspective qu'il convient de placer la fonction spéciale dévolue au Secrétaire général en vertu de l'article 319 paragraphe 2, alinéa a) qui le charge de faire «rapport à tous les Etats parties, à l'Autorité et aux organisations internationales compétentes sur les questions de caractère général qui ont surgi à propos de la Convention». On a considéré, dès le départ, que cette fonction “devait intégrer l'aspect économique des incidences du nouveau régime des mers et des océans»(52). Le Secrétariat estimait qu'elle lui permettait de «faire ressortir l'impérative nécessité de lier les activités de fond prévues par la Convention à l'effort global de développement économique et social des pays en développement et aux activités déployées par le système des Nations Unies à l'appui de cet effort»(53).
 
B –Quand au régime intérimaire.
Le Secrétaire Général de l'O.N.U. est chargé en vertu de la Résolution I portant création de la Commission préparatoire d'assurer à cette dernière les services du secrétariat ainsi que quelques fonctions particulières portant sur l'application du régime juridique des investissements pionniers dans les activités préliminaires relatives aux nodules polymétalliques tel que celui-ci est défini par la Résolution II de la Conférence.
a) - Assurer les services de Secrétariat.
Le Secrétariat des Nations Unies est, en effet, investi de la mission d'adapter un support administratif et logistique à la Commission préparatoire. Son rôle consiste donc à lui procurer un appui indispensable pour l'exercice de ses fonctions.(54)

1؛ - Support administratif.
L'Assemblée Générale adopta ainsi comme première mesure, le maintien du personnel du Secrétariat de la 3ème Conférence sur le droit de la mer, tout en autorisant le recrutement du personnel temporaire suplémentaire. Par ailleurs, et afin de mieux assurer sur place les services de la Commission préparatoire, elle autorisa l'affectation à la Jamaïque d'un nombre suffisant de fonctionnaires(55). Il s'agit là d'une formule de compromis entre la proposition du groupe des Etats latino-américains tendant à établir immédiatement à Kingston un important Secrétariat et le refus des pays industrialisés d'accepter les implications financières d'une telle proposition(56). La Commission préparatoire, n'ayant commencé son travail de fond qu'en 1984, le Secrétaire Général décida, par mesure d'économie, de ne pas utiliser toutes les ressources dont il disposait pour développer le bureau de kingston qui demeura modeste.
Un projet de résolution fut alors présenté par lui, proposant «l'affectation à la Jamaïque d'un nombre suffisant de fonctionnaires du Secrétariat pour assurer le service de la Commission préparatoire compte tenu des besoins découlant de ses fonctions et de son programme de travail(57).

2؛ - Support logistique.
Aux termes dudit compromis qui a été définitivement adopté par une résolution de l'Assemblée Générale du 3 décembre 1982(58), la moitié des administrateurs du Bureau du droit de la mer de New York, (c'est-à-dire 9 sur 18) seraient transférés à la Jamaïque pour assurer les services fonctionnels de la Commission. Le Secrétaire Général présenta dès novembre 1982 un bilan(59) dans lequel il proposait que soient justement maintenus en l'état, les effectifs du Secré-tariat de la Troisième Conférence chargés des services fonctionnels, en y ajoutant toutefois le personnel nécessaire pour coordonner l'administration des services de la Conférence et fournir des services d'appui au personnel qui lui serait affecté.

b - Fonctions particulières relatives au régime des investissements préliminaires.
Deux sortes de fonctions: l'une portant sur l'inscription des demandes d'enregistrement des investisseurs-pionniers, c'est-à-dire un rôle de greffier; l'autre sur l'observation et le contrôle technique et scientifique. Il s'agit, ici, d'un nouveau domaine océanique découvert récemment par une haute technologie sophistiquée et qui doit être surveillé et contrôlé par de grands experts techniques.
1؛ - Rôle de «greffier»: inscription des demandes d'enregistrement des investisseurs-pionniers.
Il est prévu dans les procédures et directives concernant l'enregistrement des investisseurs-pionniers en application de la Résolution II adoptée provisoirement par la Commission préparatoire depuis le 8 septembre 1983(60) que les demandes d'enregistrement en qualité d'investisseur-pionnier devaient être soumises par l'Etat certificateur au Secrétaire Général à charge pour celui-ci d'inscrire les demandes dans un registre spécial et d'en accuser réception, puis d'aviser le Président de la Commission préparatoire de la réception des demandes(61).
Sur la base de cette décision, et en application d'un accord qui est intervenu entre eux le 31 août 1984 et qui a été tacitement entériné par la Commission pré-paratoire(62), la France, l'Inde, le Japon et l'URSS ont tenu une réunion à Genève le 17 décembre 1984 pour procéder à l'échange des coordonnées concernant les secteurs d'activités pour lesquels ils avaient préalablement déposé des demandes d'enregistrement(63). Les diverses enveloppes contenant ces coordon-nées, qqui étaient conservées sous plis scellés par le Secrétaire général des Nations Unies, ont donc été ouvertes à cette date en présence du Représentant spécial du Secrétaire Général qui a dressé un procès-verbal de l'échange intervenu.
Les fonctions transitoires exercées par le Secrétaire Général des Nations Unies au service de la Commission préparatoire ont connu, de la sorte, une légère extension, dans la mesure où, la simple mission de support administratif et logistique que le Secrétariat est censé apporter à la Commission à été dépassée. Ainsi, le Secrétaire Général a pu être «étroitement associé à la mise en œuvre des règles sur la protection des investissements préliminaires, dont la portée économique est évidente.
2؛ - Fonction nouvelle d'observation et de contrôle technique et scientifique.
Dans le cadre du Département des affaires économiques et sociales, et, en vue d'intégrer les ressources de l'espace marin et leur utilisation dans le processus du développement(64), le service de l'économie et de la technologie des océans fut particulièrement chargé de mener des travaux de recherche et d'analyse portant sur le perfectionnement des méthodes de planification et de gestion de l'exploitation des ressources marines afin d'assurer leur mise en valeur dans le cadre de l'économie mondiale, de fournir aux gouvernements des analyses et des informations à jour sur les ressources marines notamment, les minéraux et l'énergie des océans, et d'établir les cartes indiquant le potentiel minéral des fonds marins dans plusieurs régions. De même, en matière de technologies marines côtières, le Secrétariat de l'O.N.U. doit entreprendre des études portant sur l'évaluation des techniques marines sur les innovations technologiques et sur l'utilisation et la mise au point de techniques adaptées à des conditions spécifiques.
Or, dans ces domaines nouveaux du droit international de la mer, on s'est vite rendu compte qu'il ne suffit pas de réunir une quantité considérable de documents, mais il faut surtout pouvoir engager des travaux très poussés de recherche et d'analyse dans les domaines juridique, scientifique et financier. Ceci appelle un degré très élevé de spécialisation et de formation technique et scientifique adéquate; d'où la nécessité de recourir à des consultants ou à des groupes d'experts hautement qualifiés. Par conséquent, le rôle du Secrétariat ne peut plus se limiter à un rôle classique d'étude et de recherche; car vu l'importance de la compétence technique dans ce domaine océanique nouvellement découvert grâce à une technologie très sophistiquée, c'est un rôle nouveau que doit assumer le Secrétariat, qui consiste dans une fonction d'observation et de contrôle. N'est-il pas chargé par la Commission préparatoire de surveiller et d'analyser les activités des consortia internationaux et autres entités qui s'intéressent à l'exploitation minière des fonds marins?.
La proposition de maintenir le Bureau du représentant spécial du Secrétaire Général pour le droit de la mer, comme unité centrale assurant le service de la Commission préparatoire en collaboration avec tous les secteurs du système des Nations Unies(65) doté en même temps des plus hautes qualifications et de la capacité d'observer et de contrôler les activités portant sur l'exploitation minière des fonds, n'est-elle pas un indice suffisant conférant au Secrétariat Général un rôle plus important que par le passé? N'y a-t-il pas là une sorte de «soft control» du même genre que celui mis en place par le «code de conduite» pour le transfert de technologie?(66). Le Secrétariat de l'O.N.U. ne tendrait-il pas aujourd'hui à remplacer la «mission» que G. Gidel souhaitait assigner au Bureau International de la mer» dont il avait proposé la création(67) Un demi-siècle plus tard, l'idée est-elle devenue une réalité?
Le Secrétariat constitue ainsi l'un des principaux organes exécutifs de l'Autorité. Il présente, comme nous l'avons démontré, des éléments nouveaux qui le distingue des secrétariats classiques des institutions spécialisées tant en ce qui concerne le statut du personnel administratif et du Secrétaire Général, que le rôle nouveau dévolu à ce dernier dans ses rapports avec les autres organes de l'Au-torité - rôle médiateur - qu'avec le Secrétariat Général des Nations Unies où la coopération et la spécialisation s'avèrent très développées pour la mise en marche de l'Administration de l’Autorité internationale des fonds marins.Il s’y ajoute que le Secrétariat de l’Autorité doit s’aquitter, en vertu de l'Accord 1994, des fonctions de l'Entreprise jusqu'à ce que celle-ci commence  à  fonctionner  de  façon  indépendante.  Le  Secrétaire  général de l'O.N.U. nomme parmi le personnel de l'Autorité un Directeur général par intérim pour superviser fonctions attribuées au Secrétariat(68).